Accord de Paris

L’Accord de Paris est adopté ! Après d’intenses négociations et une mobilisation de la société civile sans précédent, les 195 Parties à la Convention sont parvenues à se mettre d’accord sur un texte. C’est un tournant historique dans la lutte contre les changements climatiques ! Il comprend des éléments essentiels : 

  • Un objectif à long terme de maintenir l’élévation de la température bien en dessous de 2°C et de poursuivre les efforts pour limiter l’augmentation de la température sous les 1,5°C.
  • Un dynamisme avec un cycle quinquennal de révision de l’ambition et un bilan collectif tous les 5 ans.
  • Une place accrue pour l’adaptation.
  • Une place à part pour la question des pertes et dommages (qui surviennent malgré les politiques d’atténuation et d’adaptation).
  • Des moyens supplémentaires pour le financement avec la définition d’un nouvel objectif chiffré en 2025 et aussi la création d’un comité sur le renforcement des capacités, des dispositions supplémentaires sur le transfert de technologies, etc. Un cadre sur la transparence renforcé (pour le suivi, le rapportage et la vérification des émissions et leur comptabilisation).
  • Une différenciation entre les pays développés et les pays en développement plus adaptée aux circonstances nationales et aux capacités de chaque Etat. Cela tout en prévoyant que les pays développés continuent à assumer leurs obligations et prennent les devants en matière d’atténuation et de financement.
  • La reconnaissance de droits essentiels comme le droit à la santé, le droit des peuples indigènes, des migrants, des enfants, des communautés locales et celui des femmes avec l’égalité des genres. La prise en compte de principes comme celui de la transition juste ou de la justice climatique.
  • Plusieurs l’ont dit, cet accord n’est pas parfait mais il est meilleur que la somme des intérêts nationaux. S’il n’a pas réglé le problème climatique du jour au lendemain, il constitue une base solide pour agir et sauver notre planète. 

Le résultat

Pourquoi un nouvel accord ?

Les changements climatiques sont un phénomène global. À des intensités différentes, nous en ressentons déjà tous les conséquences. Celles-ci continueront à s’amplifier à mesure que les émissions de gaz à effet de serre continueront de croître. Et même si nous arrivons à réduire nos émissions, les effets délétères du passé se maintiendront encore pendant des décennies. L’urgence est donc bien réelle. Afin de réduire les émissions et de s’adapter aux impacts des changements climatiques, il est crucial d’agir collectivement.

Avant même le début de la première période d’engagement du Protocole de Kyoto (2008-2012), les Parties à la Convention ont cherché à mettre en place un nouveau régime post 2012. En 2009, à Copenhague, les Parties à la Convention ont tenté, sans succès, d’adopter un accord global. Après cet échec, les discussions ont progressivement repris. À Durban, en 2011, les Parties se sont engagées dans une deuxième période d’engagement du Protocole de Kyoto et se sont fixé une nouvelle date butoir : décembre 2015 à Paris. Cela était d’autant plus nécessaire que les objectifs de réductions sous le Protocole de Kyoto prennent fin en 2020 et que ce dernier couvre moins de 15% des émissions mondiales.

Pour une description des étapes de négociations depuis 1992 : cliquez ici.

Décision & Accord

Tenue du 30 novembre au 12 décembre à Paris, la COP21 a abouti une décision inédite et des contributions.

La COP21 s’est clôturée sur l’adoption d’une décision à laquelle est annexée le texte de l’Accord de Paris. Cette décision est importante, car elle inclut, entre autres, des paragraphes sur la mise en œuvre de l’Accord avant son entrée en vigueur ou encore sur l’augmentation de l’ambition pré 2020.

Quant aux contributions (ou Intended Nationally Determined Contribution (INDC) en anglais), ce sont les engagements que les pays entendent adopter dans le cadre du futur accord. Ces contributions portent sur l’atténuation (la réduction des émissions) et, de manière volontaire, sur l’adaptation. À ce jour, 188 Parties représentant plus de 95% des émissions mondiales ont soumis leurs contributions. L’Union européenne et ses États membres ont présenté une contribution commune. Celle-ci est basée sur les conclusions du Conseil européen d’octobre 2014 pour un nouveau cadre d’action à l’horizon 2030. L’Union européenne s’est ainsi fixé un objectif de réduction d’émissions d’au moins -40% en 2030 par rapport à 1990.

Toutes les contributions des Parties sont disponibles ici.

Et la suite ? L’accord et la décision contiennent de nombreuses références à un programme de travail à mettre en œuvre avant l’entrée en vigueur de l’accord. D’ici 2020, il y a aura donc encore un important travail de négociation.

Les Parties devront aussi lancer leur processus de ratification de l’Accord. En outre, elles seront occupées à la mise en œuvre de leur contribution. L’UE a déjà bien avancé sur ce point.

Par ailleurs, la mise en œuvre de la Convention et du Protocole de Kyoto continuent.

À l’origine fortement centrée autour de l’atténuation, l’ambition pré 2020 s’élargit à l’adaptation afin d’identifier les opportunités concrètes pour augmenter la résilience. Le processus technique sur l’atténuation afin d’identifier les opportunités de réduction d’émissions va se poursuivre également. Une réunion de haut niveau sera organisée chaque année en parallèle de la COP afin de renforcer la participation mais aussi les actions dans le cadre de l’ambition pré-2020. La décision fait aussi référence au soutien financier avec la demande aux pays développés d’amplifier leur aide financière à l’aide d’une feuille de route. Par contre, elle ne mentionne pas les gaz HFC ni le transport international (maritime et aérien).

Le préambule

Dans son article 2, l’accord contient trois objectifs :

Un premier sur l’atténuation afin de limiter « l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels et en poursuivant l’action menée pour limiter l’élévation des températures à 1,5°C par rapport aux niveaux préindustriels, étant entendu que cela réduirait sensiblement les risques et les effets des changements climatiques »; Pour 2018, le GIEC devra fournir un rapport sur l’impact d’un réchauffement d’1,5°C et les trajectoires d’émissions associées.

Un deuxième sur l’adaptation afin de renforcer « les capacités d’adaptation aux effets néfastes des changements climatiques et de promouvoir la résilience à ces changements et un développement à faible émission de gaz à effet de serre, d’une manière qui ne menace pas la production alimentaire »;

Un dernier sur le financement afin de rendre « les flux financiers compatibles avec un développement à faible émission de gaz à effet de serre et résilient aux changements climatiques ».
Concernant l’atténuation, en plus de l’objectif de 2°- 1,5°C, l’accord prévoit un plafonnement des émissions aussi vite que possible et un équilibre entre les émissions et les absorptions anthropiques dans la deuxième moitié du siècle. Enfin, comme expliqué plus haut, 188 Parties à la Convention ont soumis une contribution.

Il était nécessaire de faire en sorte que tous les pays s’engagent en fonction de leur capacité actuelle (et non pas sur la base d’une distinction datant d’il y a plus de 20 ans) et que les pays les plus vulnérables continuent de recevoir un soutien des pays développés. Sous chaque section de l’accord ce principe est détaillé de manière plus spécifique.

  1. Atténuation : c’est le principe des contributions déterminées nationalement qui domine. Chaque pays est donc libre de déterminer sa contribution. Néanmoins, quelques principes encadrent ces contributions :
  2.  
    •  Chaque contribution représentera une progression par rapport à des contributions antérieures et reflétera son plus haut niveau d’ambition. 
    • Les pays développés devraient (should) continuer de prendre les devants en souscrivant à des objectifs absolus de gaz à effet de serre couvrant toute leur économie.
    • « Les pays en développement devraient (should) continuer d’accroître leurs efforts d’atténuation, et sont encouragés à passer progressivement à des objectifs de réduction ou de limitation des émissions à l’échelle de l’économie eu égard aux contextes nationaux différents ».
  3. En termes financiers, la distinction entre pays développés et pays en développement reste marquée. Il est ainsi prévu que « les pays développés fournissent des ressources financières pour venir en aide aux pays en développement Parties aux fins tant de l’atténuation que de l’adaptation dans la continuité de leurs obligations au titre de la Convention ». Toutefois, la base des pays donateurs est élargie aux pays en développement de manière volontaire.
  4. Adaptation : c’est essentiellement une approche nationale, mais avec une prise en compte des besoins particuliers des pays les plus vulnérables.
  5. Transparence : la différenciation s’organise largement autour de la question des capacités des Etats parties à la Convention. Il s’agit donc d’un système plus commun mais avec des flexibilités prévues en fonction des capacités et non plus d’une catégorie de pays.

Contrairement à Kyoto qui avait une période d’engagement initiale de seulement 5 ans et pour lequel il a été difficile de renégocier une deuxième période d’engagement, cet accord-ci devra s’inscrire dans la durée afin d’éviter des phases difficiles de négociation répétitives mais surtout pour s’assurer que la lutte contre les changements climatiques se poursuive effectivement sur le long terme. En effet, d’après le GIEC, pour avoir une chance de parvenir à maintenir l’augmentation de la température sous les 2°C par rapport aux niveaux préindustriels, il faut réduire les émissions de 40 à 70% en 2050 comparé à 2010 et arriver à des niveaux d’émissions proches ou en-dessous de zéro en 2100. Cela est très important au regard des contributions soumises par 188 Parties. Si celles-ci nous ont écarté d’un scénario à +4°C, elles ne nous placent pas encore sur une trajectoire d’augmentation de la température de moins de 2°C.

Comme première étape, un bilan global est prévu dans l’article 14. Le but est de réaliser un état des lieux des progrès par rapport aux objectifs de cet accord et d’informer les parties dans leur mise à jour de leurs actions et soutiens. Il ne porte donc pas seulement sur l’atténuation, mais aussi sur l’adaptation, le financement et le transfert de technologies. Le premier bilan global aura lieu en 2023 et puis tous les 5 ans. Toutefois, dans la décision, un premier état des lieux (dialogue facilitatif) est prévu en 2018 afin d‘informer la préparation des prochaines contributions (2020).

Le dynamisme lui-même est spécifié sous chaque thématique.

  • Ainsi, sous l’atténuation, des contributions doivent être soumises tous les 5 ans avec un premier rendez-vous en 2020.
  • Sous le financement, il y a une obligation pour les pays développés de communiquer des informations indicatives sur le financement.
  • Sous l’adaptation, le dynamisme est beaucoup plus libre.

Les participations écrites ont été analysées et prises en compte dans le cadre de l’élaboration d’une première version du Plan Air Climat Energie 2030.

Atténuation

L’article sur l’atténuation fait référence à deux objectifs spécifiques ambitieux : un plafonnement des émissions aussi vite que possible et un équilibre entre les émissions et les absorptions anthropiques dans la deuxième moitié du siècle. Le plus important est l’obligation pour toutes les Parties de communiquer une nouvelle contribution tous les 5 ans. Ainsi, dès 2020 la décision demande aux Parties ayant une contribution jusqu’en 2025 de communiquer une nouvelle contribution et pour celles ayant une contribution jusqu’en 2030 de resoumettre ou d’actualiser leur contribution. Par ailleurs, les Parties doivent prendre des mesures internes pour l’atténuation en vue de réaliser les objectifs de leur contribution. En outre, toutes les Parties s’emploient à formuler et communiquer des stratégies à long terme de développement à faibles émissions.

Cet article prévoit également la continuation des mécanismes de marché via deux catégories : l’un de transfert de réductions d’émissions et l’autre semblable au Clean Development Mechanism (CDM) ou à la Joint implementation (JI). Les modalités et procédures devront encore être décidées, mais elles devront respecter le principe de no double counting et assurer l’intégrité environnementale. Malheureusement, contrairement à la demande de l’Union européenne, l’article ne fait pas référence aux émissions du transport international aérien et maritime. 

La réduction des émissions (atténuation) est indispensable pour lutter contre les changements climatiques. Néanmoins, les changements climatiques sont malheureusement déjà une réalité et les impacts se font sentir partout. À mesure que la température moyenne augmentera, l’intensité des changements et leur fréquence s’intensifieront également. Il est donc nécessaire de s’adapter aux impacts actuels et de se préparer aux impacts futurs. Cela concerne tous les pays, mais particulièrement les plus vulnérables : les États insulaires, les États africains et les pays les plus pauvres.

L’accord reconnait l’importance de l’adaptation. Il établit un objectif mondial « consistant à renforcer les capacités d’adaptation, à accroître la résilience aux changements climatiques et à réduire la vulnérabilité à ces changements, en vue de contribuer au développement durable et de garantir une riposte adéquate en matière d’adaptation dans le contexte de l’objectif de température énoncé à l’article 2 ».

L’accord reconnait aussi l’importance des pertes et dommages, qui ont lieu malgré les mesures d’atténuation et d’adaptation, puisque cette question est désormais traitée dans un article (l’article 8) séparé de l’adaptation. Le « Warsaw International Mechanism », un mécanisme spécifique à cette thématique et créé en 2013 sous la Convention a été maintenu à Paris. Ces dispositions devraient permettre de mieux coopérer sur les systèmes d’alertes, d’assurance ou la préparation aux situations d’urgence. Enfin, à la demande des pays développés, il est prévu dans l’accord que l’article sur les pertes et les dommages ne constitue pas une base légale pour des demandes de compensation.

À Copenhague, les pays développés se sont engagés à mobiliser 100 milliards US$ par an à partir de 2020. Ils se sont également engagés à fournir, sous le nom de Fast start, 30 milliards de US$ pour la période 2010 – 2012

Formellement établi à Cancun, le Fonds vert pour le Climat est aujourd’hui capitalisé ; les premières contributions ont été versées et devraient prochainement atteindre les 10 milliards US$ si toutes les promesses de dons faites par les Etats sont honorées. Il doit permettre d’aider les pays en développement à adopter des mesures d’atténuation et d’adaptation.

Dans la décision qui accompagne l’accord, il est prévu qu’avant 2025 un nouvel objectif quantitatif soit défini à partir du minimum de 100 milliards US$ en 2020.

Les institutions du mécanisme financier de la Convention, comme le Fonds vert pour le Climat serviront l’accord. Le fonds d’adaptation placé sous le Protocole de Kyoto pourra servir la Convention. Il est demandé à la Conférence des Parties représentant les Parties au Protocole de Kyoto de se prononcer sur cette question.

Enfin, comme le dit l’article 2 de l’Accord il faudra viser à rendre « les flux financiers compatibles avec un profil d’évolution vers un développement à faible émission de gaz à effet de serre et résilient aux changements climatiques ». Il sera donc impératif de réorienter les flux de financement en faveur d’une économie bas carbone. A titre d’exemple, en 2013, les gouvernements ont attribué plus de 550 milliards US$ de subsides à la consommation aux énergies fossiles contre 121 milliards pour les énergies renouvelables . Une étude du FMI estime les coûts (subsides à la consommation, la production, externalité négative inclue,…) des subsides aux énergies fossiles à 5,3 milliers de milliards US$ pour 2015.

Sur les autres moyens de mise en œuvre comme le renforcement de capacité, un comité se chargeant de cette question a été établi. Concernant le transfert de technologies, l’accord consacre le partage d’une vision à long terme afin de réduire les émissions de GES et d’accroître la résilience aux changements climatiques. L’accord met l’accent sur de nouvelles opportunités de financement en matière de recherche et développement. Il n’y a pas de référence au droit à la propriété intellectuelle qui continue donc d’être discuté au sein de l’OMC.

Les règles sur le suivi des émissions et le rapportage des actions et du support étaient très différenciées selon la logique pays développés – pays en développement. Aujourd’hui avec l’Accord, et en particulier avec les règles relatives à l’action (donc à la réduction des émissions), on évolue vers un système plus commun, mais avec des flexibilités pour prendre en compte les capacités des Etats. Les révisions des rapports seront ainsi étendues à tous les pays.

Dans le même temps, une « Capacity-Building initiative for Transparency » est lancée afin d’accroître les capacités institutionnelles et techniques des pays en développement en matière de surveillance et rapportage des émissions.